Edition Pygmalion, 2007
Il est des livres qui passent complètement inaperçus à leur sortie et on se demande bien pourquoi. D’autres reçoivent des prix et on se demande bien pourquoi aussi. Insolente vertu est un roman magnifique à l’écriture très travaillée qui aurait bien mérité une récompense littéraire. Il a été écrit par une auteure qui aime passionnément la langue française.
L’action du roman se situe en Camargue dans le milieu de la tauromachie. Ce n’est pas très gênant si l’on déteste cette pratique parce que l’essentiel se situe ailleurs.
Il s’agit avant tout d’une histoire d’amour entre une jeune femme angélique, belle et brillante, au caractère toutefois affirmé et un gardian taciturne, un peu brutal. De l’amour, M.-B. Sassi dit : « (…) être et donner sont un même acte, l’acte d’amour qui ne s’explique pas » (p.127). A cette histoire d’amour s’ente une intrigue qui se déroule, elle, dans le monde du marché de l’art. Il est question de Thomas Gainsborough, Joshua Reynolds, Vincent Van Gogh et nous sont offertes des informations foisonnantes et passionnantes sur le sujet.
J’y ai trouvé des choses très intéressantes notamment sur une des fonctions possibles de l’Art : « l’artiste meurt, son nom demeure » (p. 125). Ecrire un roman, peindre un tableau, composer une musique inoubliables ne permettent-ils pas de devenir en quelque sorte immortel ?
On y trouve aussi « un bref instant, si bref et si violent d’éternité » (p.126), un slave salvateur, l’œuvre de l’amour (p.87) (1), la notion d’exil (p.161) et tout ceci m’évoque, même si le style est différent, les écrits de l’auteur du Testament français. On peut éventuellement penser que M.-B. Sassi a lu A. Makine ou qu’ils se sont rencontrés.
Et cette phrase que seuls les rêveurs professionnels (dont je fais partie) comprendront : « La part du rêve qui nous permet de vivre et qui pourtant se dérobe dès qu’éveillés nous tentons de l’appréhender » (p. 127).
Roman hautement recommandable.
(1) Gabriel Osmonde (alias Andreï Makine), L’oeuvre de l’amour, Pygmalion, 2006
Sophie Becker, septembre 2013